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Un an de “guerre oubliée” au Soudan
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Un an de “guerre oubliée” au Soudan

Un article rédigé par Suzanne Marion - RCF, le 16 avril 2024  -  Modifié le 16 avril 2024
Le dossier de la rédaction Un an de la guerre au Soudan : un conflit oublié

Le 15 avril 2023, la guerre a éclaté entre deux généraux de l’armée. Une lutte pour arracher le pouvoir et dont la première victime est la population de ce grand pays de l’est de l’Afrique. C’est l’une des pires "crises humanitaires et de déplacement de populations au monde" selon l’ONU. Pourtant, c’est une crise qui passe sous les radars et qui risque de devenir "une crise oubliée" de l’aveu même du ministère des affaires étrangères français.

Image d'archive : Un soudanais prie dans un cimetière d'Omdurman en 2019. Crédit photo :Laurent Perpigna Iban / Hans Lucas Image d'archive : Un soudanais prie dans un cimetière d'Omdurman en 2019. Crédit photo :Laurent Perpigna Iban / Hans Lucas

La conférence de Paris pour le Soudan s’est conclue lundi 15 avril sur une promesse de plus de 2 milliards d’euros pour financer l’aide humanitaire. Un soutien bienvenu alors que les ONG sur place sont en difficulté. En plus des besoins de financement, elles ont du mal à accéder au territoire, notamment à cause des frontières et routes bloquées. Mais aussi de la dangerosité sur place où les "affrontements [sont] réguliers" avec "des bruits de balles et des frappes aériennes" comme témoigne Claire Nicolet, responsable du programme Urgence Soudan de Médecins sans frontières.  

 

Une crise humanitaire profonde 

 

Plus de 9 millions de personnes ont fui la guerre depuis 1 an, dont 1.8 million qui se sont rendues à l’étranger, notamment au Tchad. Des déplacés qui "ont peu d’accès à l’eau et pas de nourriture distribuée depuis des mois" rappelle l’humanitaire. La menace de la famine est forte, un Soudanais sur trois est confronté à des niveaux élevés d’insécurité alimentaire selon Action contre la faim. 

Mais la population se retrouve aussi prise au piège, comme à Khartoum, la capitale à l’est du pays. Dans la ville, "la population est complètement encerclée et enfermée depuis plus de 6 mois" observe Claire Nicolet, quand les habitants tentent de fuir "ils se font arrêter et questionner." Risquant l’arrestation par l’armée qui considère que les habitants de la capitale, s'ils y sont restés, soutiennent les Forces de soutien rapides qui la contrôlent.

Cette guerre fait aussi des morts, des dizaines de milliers. Mais il est difficile d’estimer précisément le bilan humain. "On a très peu d’accès aux chiffres" explique la chercheuse Raphaëlle Chevrillon-Guibert, membre de l’Institut de recherche pour le développement et associée au Centre d'étude et de documentation juridiques, économiques et sociales. Il y a des coupures régulières d'Internet. Environ 70 % des hôpitaux ne fonctionnent plus, car ils ont été détruits par les combats. Alors que "les syndicats des médecins sont normalement très actifs pour faire les décomptes mortuaires, là, on n’a pas d’informations. On est un peu dans l’ignorance des chiffres, mais on sait que c’est massif" complète Raphaëlle Chevrillon-Guibert.

 

Une guerre qui s'enlise

 

Après la révolution de 2019 qui a renversé le dictateur Omar el-Bechir, le processus de transition démocratique n’a pas abouti. L’armée a fait un coup d'État en octobre 2021. Mais en 2023, les deux généraux anciennement alliés se sont déclaré la guerre pour le pouvoir. Aujourd’hui, il n’y a pas vraiment de rapport de force qui se dessine dans les combats.

Mais si la guerre dure, c’est aussi parce que des puissances étrangères sont impliquées. Elles financent les camps et fournissent des armes. Le Soudan a une position stratégique : à la fois au sud de la Libye et de l’Egypte, aux portes du Sahel, mais aussi au bord de la Mer Rouge. De plus, les ressources naturelles du Soudan sont convoitées et notamment celles en or. 

"L’armée et les Forces de soutien rapides sont très impliquées dans l’exploitation de l’or, explique Raphaëlle Chevrillon-Guibert, la filière côté armée ça va être l’Egypte, depuis un an les réserves de la banque centrale égyptienne ont explosé. De l’autre côté, on sait que les Emirats arabes unis soutiennent activement les Forces de soutien rapide.

La Russie, fait aussi partie des parties prenantes, elle est liée aux deux camps selon la chercheuse. "Ils avaient misé depuis longtemps sur le Soudan, c’est des rapports historiques, détaille-t-elle, c’est à la fois des liens directement étatiques ou des entreprises privées qui ont obtenu des licences, notamment sur l’or. Et le groupe paramilitaire Wagner qui est très connu pour son appétit pour l’or dans la région sahélienne qui est engagé."

 

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Le dossier de la rédaction © RCF
Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
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